Je vais décrypter l’affiche de la campagne 2012 de Nicolas Sarkozy. Je vais être le plus objectif possible, réaliser une sémiologie de l’image dénuée d’anti-sarkozisme primaire ou même de pro-sarkozysme. Si c’était le cas l’interprétation de l’affiche serait faussée d’avance.
Avant de commencer ce travail de sémiologie il faut d’abord connaître et voir la première affiche de Nicolas Sarkozy, pour sa campagne de 2007. L’affiche nous montrait un futur président qui nous regardait droit dans les yeux, devant un cadre champêtre, vert, déserté – signe du repos dans un contexte où la sécurité était une priorité ? – un oiseau blanc planait sur le terme « possible » du slogan « Ensemble tout devient possible ». Cet oiseau est probablement une mouette, voire une colombe qui symboliserait la paix.
La couleur dominante : le bleu.
Le bleu est dominant. Dans la psychologie des couleurs le bleu est une couleur qui apaise, c’est une couleur relaxante, c’est la couleur du calme, de la tranquillité. C’est une couleur propice au repos. Imaginez le ciel bleu… Symboliquement le bleu est une couleur divine, elle véhicule des impressions de loyauté, de justice, de tolérance, d’équilibre, de contrôle de soi.
Un léger jaune apparaît à l’horizon. C’est le soleil qui se lève ou qui se couche. Cette couleur fait écho à la couleur du visage de Nicolas Sarkozy. Est-ce que Nicolas Sarkozy est un soleil ? Le soleil c’est l’étoile la plus proche de la Terre. C’est la principale source d’énergie, de chaleur et de lumière dans le Système solaire. Les scientifiques affirment que le soleil a permis la vie sur Terre. Ainsi, sans Nicolas Sarkozy, ce serait la fin ? L’obscurité ? Les ténèbres ? La mort ? C’est ce que voudrait signifier l’image.
Il faut noter que par rapport à 2007 les nuages n’ont plus de place. En effet, les nuages au-dessus de la mer sont le signe qu’une tempête se prépare. Sur l’eau il serait bien difficile de trouver refuge.
La position.
Ce qui frappe d’abord notre regard, c’est la position du corps. En 2007 Nicolas Sarkozy nous montrait son côté gauche, en 2012 le candidat nous montre son côté droit.
Son visage.
Ses cheveux sont grisonnants, c’est probablement le signe d’un homme qui a acquis depuis fort longtemps une certaine maturité, de l’expérience et donc une certaine sagesse. Les rides du visage appuient cette idée. Nicolas Sarkozy a un visage sérieux, il veut montrer du courage, de la persévérance devant l’âpreté du temps. C’est le temps que nous traversons, fait de turbulences de la crise, du chômage, des dettes de l’État, et autres fléaux. Il est sérieux et courageux, mais un léger sourire marqué par la pliure de la joue montre que ce qu’il vise du regard est plutôt positif. Il voit ce que nous ne voyons pas.
Le candidat de 2012 a le regard vers la droite – une récurrence dans l’affiche. Même si pour le candidat nous répète que la croissance n’est pas une question de gauche ou de droite l’affiche nous montre un candidat tourné vers la droite, c’est un signe à ne pas négliger dans une affiche qui veut donner du sens. Une affiche se prépare pendant plusieurs jours, les choix ne sont pas un hasard.
Le costume.
Il est noir. La cravate a changé. En 2007 elle était bleue, en 2012 elle est noire, la texture semble évoquer la cotte de mailles. Pour ceux qui ne le savent pas la cotte de mailles est un vêtement constitué d’une pièce rigide, métallique, créée pour protéger le corps. La cotte de mailles est souple et permet une liberté de mouvement.
A la gauche du costume – pour changer – il y a la rosette sur pin’s – pour le revers de veste – que nous retrouvons également sur le costume de 2007, cinq ans auparavant. C’est le signe de la Légion d’Honneur. Il y a d’autres déclinaisons de la Légion d’Honneur, la rosette sur pin’s est plutôt discrète comparée aux autres.
Dans l’affiche de 2012 nous ne voyons plus que le buste du président candidat. L’attention est portée sur le visage.
A l’horizon, l’inconnu.
Nous ne savons pas où nous allons, mais le candidat, lui, semble savoir où il veut nous mener. Nous nous souvenons des propos du candidat du Front de Gauche, Jean-Luc Mélenchon, à l’encontre du candidat du Parti Socialiste François Hollande : « un capitaine de pédalo » dans une tempête. Le candidat le l’UMP s’inscrit dans cette image. Nous voyons une étendue d’eau, une mer ou un océan calme.
Sur LeMonde.fr Alexandre Léchenet révèle qu’il s’agit de la mer Égée, qui borde la Grèce. Nous connaissons tous la situation actuelle de la Grèce, un pays proche de la faillite. L’image d’une mer déchaînée en pleine tempête serait plus appropriée, pensez aux peintures du XIXème siècle qui ont représenté la tempête – Tempête sur les côtes de Belle-île, de Théodore Gudin (1802-1880), La tempête ou l’épave de Théodore Géricault (1791-1824) et bien d’autres… Au lieu de cela nous voyons une mer calme, tranquille. Nicolas Sarkozy tourne le dos vers la mer. Dans une image ou une photo le cadre devant lequel une personne est posée est censé révéler l’état d’esprit de cette personne. Nicolas Sarkozy n’ignore pas la Grèce, un pays membre de l’Union Européenne, il lui voit un futur meilleur et il veut nous y emmener.
Par ailleurs il faut rappeler que la mer Égée est liée à la mer Méditerranée, une mer commune à plusieurs pays, à plusieurs continents : l’Europe, l’Afrique et l’Asie. La mer calme rassemble. Chacun peut la traverser dans le calme, loin de la tempête.
Dans cette image Nicolas Sarkozy montre l’apaisement, comme en 2007, dans le contexte d’une campagne basée sur la sécurité intérieure de l’Hexagone. Nous nous souvenons tous de la déclaration privée de l’ancien candidat en parlant des banlieues qu’il voulait « nettoyer au kärcher ». Aujourd’hui, après 5 années de gouvernance, Nicolas Sarkozy veut une France forte.
Le slogan : « La France forte »
Rien dans cette affiche n’affirme que la France est faible et fragile. Il y a un slogan plutôt concis par rapport à 2007 : « La France forte ». Le candidat est clair et va droit au but, il parle d’un pays fort. Il aurait pu dire « Des Français forts », mais il a choisi la nation, l’État, avec son ensemble de Français et d’étrangers.
Derrière l’idée de force il y a celle de courage, d’invulnérabilité et d’invincibilité. Le terme fort est de la même famille que forteresse et fortification. Nous pensons à un château, à un fort, un lieu solide et protégé. Un lieu qui traverse l’adversité et le temps, un lieu protégé de la destruction.
Ce slogan nous rappelle celui de Valérie Giscard d’Estaing, pendant sa campagne présidentielle de 1981, c’était « Il faut une France forte ». C’est probablement ici une stratégie électorale qui consiste à attirer des électeurs de François Bayrou, ancien membre de l’UDF (Union pour la démocratie française), un parti dont le MoDem est le successeur.